Jiyana Tassin, 23.09.2020
Depuis combien de temps es-tu coprésident des Jeunes Vert-e-s Suisse ?
Le 18 Janvier 2020, j’ai été élu coprésident des JVS (ndlr. Jeunes Vert-e-s Suisse). Avant ça, j’ai coprésidé la section vaudoise pendant 4 ans et je suis membre du parti depuis 5 ans.
Tu es également vice-président des VERTS Suisse depuis mai, qu’est-ce que t’apportent ces deux postes au quotidien ?
Du stress et de l’angoisse (rires) ! Je plaisante mais à vrai dire je ne les conçois pas vraiment de manière personnelle. Je me dévoue entièrement au parti, à ses idées et à ses membres. L’intérêt, la santé ainsi que l’intégrité de ce dernier sont primordiaux pour moi. Humainement parlant, j’ai l’opportunité de faire des rencontres incroyables et je m’épanouis aussi énormément au niveau professionnel.
Quelle est ta vision de l’engagement ? Comment le tien a-t-il commencé ?
Confucius disait qu’on a deux vies et que la deuxième commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une. Pour moi l’engagement ne représente pas des événements ponctuels mais plutôt un déclic. Le mien a été très juvénile puisque c’est en regardant des vidéos d’ours polaires à l’âge de 13 ans que j’ai décidé de m’engager. Je ne percevais pas encore les nuances entre les différents partis mais la prise de conscience et l’envie de changement étaient plus fortes. J’ai grandi avec le parti, le parti a grandi avec moi et parfois j’ai fait grandir le parti. Mais attention, je ne veux pas devenir le produit d’une seule école politique ! Les quartiers, les études, les emplois sont tout autant formateurs.
Comment est-ce que ton entourage réagit face à ton engagement ?
Vu que j’ai commencé très tôt, il fait partie de moi. Certains font du football après les cours, pour moi ça a toujours été la politique ! Il arrive que mon entourage soit agacé parce que j’ai moins de temps à leur accorder mais ils l’acceptent sinon très bien.
Est-ce que tu as remarqué une différence au niveau de l’engagement chez les jeunes ?
La flamme et la détermination existent toujours mais les outils ont par contre évolué. Avec la pandémie actuelle, tout se focalise sur le numérique. Et en tant que Jeunes Vert-e-s, notre visibilité se situe principalement dans la rue. Il faut repenser les manifestations ou encore les actions de désobéissance civile. Comment remobiliser les jeunes avec les dispositifs actuels ? C’est le plus grand défi auquel nous pouvions être confrontés.
Comment trouves-tu la collaboration entre romands et suisses allemands ?
Il faut simplement admettre que le röstigraben existe et arrêter d’éviter le sujet. Une fois accepté, les choses se passent bien mieux. Je prends, pour cette raison, mon rôle au sein du parti très à cœur car je suis l’un des seuls romands très impliqué au niveau national. Mais les rapports de forces restent malgré tout inégaux et j’admets que c’est parfois compliqué à gérer.
Est-ce que tu travailles à plein temps comme politicien ? Tu fais quoi à côté ?
Pas du tout, je suis aussi civiliste ! J’ai été engagé aux urgences à Lausanne pour une durée d’une année. Le travail est très concret et bien plus gratifiant que le travail politique. Après 5 ans d’engagement, ma seule victoire se résume au droit de vote à 16 ans qui se concrétise doucement.
Je gère également le « festival 4 saisons », un événement que j’ai créé il y a environ 5 ans dans le but de promouvoir la musique classique chez les jeunes. En parallèle, je suis assistant parlementaire de la Conseillère nationale Léonore Porchet.
Comment s’est passé le confinement du côté des JVS ?
Au niveau du bureau, ça a été très bénéfique parce qu’on a eu le temps d’avoir plus de discussions et de débats de fond. Ce qui n’est pas le cas normalement avec les campagnes, les actions ou manifestations à organiser. On a fait des réunions zoom deux fois par semaine et ça a été très bénéfique à l’interne, évidemment moins au niveau de l’engagement puisqu’on n’avait plus la rue pour s’exprimer.
Et toi, qu’est-ce que tu as fait ?
Je me suis un peu embêté mais j’ai profité de ce ralentissement pour réfléchir et travailler sur d’autres projets, notamment les droits étudiants à travers l’annulation des examens. C’était compliqué comme période mais j’ai eu plus de temps pour appeler mes amis ou encore passer des soirées en famille. Des choses toutes simples mais pour lesquelles je suis moins disponible normalement.
Est-ce que tu vois un bénéfice pour le climat dans la crise actuelle ?
Le premier point se trouve dans la prise de conscience du tout que nous formons. L’unité et la solidarité que l’on a pu observer sont une réelle démonstration de force. Dans un autre registre, cette crise a prouvé que même en temps de troubles, les plus riches s’en sortent très bien. La précarité a été elle aussi mise en lumière et c’est une chose très bénéfique. Malgré tout, le climat ne va pas mieux et c’est déprimant de réaliser que la volonté politique d’un changement climatique n’existe simplement pas.
Comment est-ce que tu vois la suite, le « après confinement » ?
Le plan de relance en Suisse reste fidèle au consumérisme d’avant covid. On n’a pas profité de cette occasion pour prendre un tournant, on continue avec la même situation. Maintenant il faut changer les rapports de pouvoir.
51% des jeunes entre 15 et 25 ans affirment ne pas s’intéresser à la politique selon une étude de 2017. Qu’est-ce que tu aurais envie de leur dire ?
Je comprends (rires) ! On responsabilise bien trop les jeunes générations et le système actuel est trop contraignant. On possède en général une image très négative des jeunes. Et ces derniers ne se sentent souvent donc pas concernés par les questions politiques. Il faut utiliser les lignes institutionnelles tout comme les autres formes d’action politique, occuper un maximum d’espace avec nos idées. Même si, je sais, ça n’est pas fun…
De quelles manières pourrait-on motiver les nouvelles générations à s’engager ?
Il faut demander concrètement aux jeunes de participer. Le droit de vote à 16 ans me semble être une des meilleures solutions. Mais il est important de garder en tête que l’investissement politique ne correspond pas à tout le monde. L’engagement est pluriel et se montre sous de multiples formes telles que la désobéissance civile, les actions jusqu’au débat entre amis. Tout devient politique dès le moment où l’on accomplit un geste qui concerne autrui.
Quels sont vos principaux projets et campagnes pour la suite ?
La prochaine campagne en liste est l’initiative jeune verte et de la GSsA contre le commerce de guerre. On lancera aussi le printemps prochain une autre initiative qu’on doit encore choisir parmi 5 propositions : la réduction radicale du temps de travail, l’interdiction d’investir dans les énergies fossiles, les transports publics gratuits, la caisse maladie proportionnelle au revenu et l’expansion du réseau de train de nuit et l’interdiction des vols continentaux. Elle rythmera ensuite les 5 prochaines années ! En parallèle, on rebondit toujours sur l’actualité en postant sur nos réseaux sociaux ou encore en organisant des manifestations et des actions.
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